Les amours de Cendre

Est-ce que je t'en veux ?

dimanche 23 août 2015 à 02h21

« Est-ce que tu m’en veux ?  »

Je rêve qu’elle revienne vers moi avec cette question, et que je puisse lui dire
oui, je t’en veux.

Je t’en veux d’avoir coupé la communication alors que tes derniers mots étaient très durs, très jugeant, très blessant, de m’avoir laissé réglé ce différent avec toi sans infos de toi.
Je t’en veux d’avoir tué mon désir, de m’avoir rendue craintive, d’avoir altéré ma relation à Jee, ma confiance à Jee.

A lui, je lui en veux de nous avoir mis dos à dos, comme si nous devions résoudre son problème. « Le problème, c’est votre manque de confiance l’une dans l’autre ». Non.
Jee avait le droit de me dire « Elle est fragile, je souhaite la ménager, du coup, JE te demande de faire des efforts avec moi ». C’est très différent que de me transmettre tes demandes.

Hors depuis le début, on parle de ce que je te demande (de te priver ? de quoi t’ai-je donc privée ? ? ) de ce que tu me demandes (d’aller moins vite, de penser à toi, de prendre soin de toi)
Je ne suis plus d’accord.
Dans une démarche inclusive, je suis prête à écouter tes problématiques, tâcher de les comprendre, voire, si c’est possible pour moi, apporter une aide, une facilité, faire un effort ponctuel. Mais en aucun cas je ne suis responsable du fait que tu trouves désagréable la façon dont Jee change, la façon dont il m’inclus dans sa vie. (Et cela te serait désagréable depuis un an ! ). En aucun cas la solution pourrait venir de moi.

Je t’en veux d’avoir laissé sous-entendre que c’était grâce à toi que j’avais aujourd’hui une telle place dans la vie de Jee, parce que tu en avais parlé avec lui, parce que tu l’avais autorisé. Depuis quand a-t-il besoin de ton autorisation pour vivre ce qui le motive profondément ?
Depuis quand être une "compagne historique" induit de posséder un pouvoir pareil sur son compagnon ?

Je t’en veux également de ne pas avoir entendu que je ne suis pas mono, que je n’ai jamais désiré t’évincer. Tu existes dans la vie de Jee, donc tu es un élément de la mienne. C’est un fait que je n’ai jamais remis en cause (contrairement à un mail de toi qui disait que tu étais en train de sortir de ma vie)
Je souhaite juste qu’on cesse de me rendre responsable de ta vulnérabilité dans ta relation à Jee. Si tu as eu peur de devenir secondaire, c’était à Jee de te rassurer, à toi d’affronter tes démons, pas à moi de prendre moins de place.

Il se trouve que, fin juin, j’ai pris la décision de me faire la plus discrète possible dans ta vie, parce que je ne voyais pas d’autres solutions pour qu’on arrête de souffrir, et que j’en regrette certaines conséquences.
C’était bien parce que cela m’a permis de dédramatiser, d’envisager tous les avenirs possibles avec sérénité (y compris ceux où Jee deviendrait pour moi secondaire), d’arrêter d’investir émotionnellement chaque propos rapporté de toi… Sans compter que ça a eu un effet bénéfique chez toi et que tu sembles moins stressée.
Mais par ailleurs, cela a figé tout mon élan vital chez moi, cela a même abouti à ce que Jee croie (et en souffre) que je ne nourrissais aucun désir de cohabiter avec lui. Simplement parce que comme je savais que c’était "ton" projet (et que j’étais mal à l’aise à l’idée d’un appart pour trois), j’avais mis ce désir là en veilleuse.
Cela a abouti à un état de passivité latente, où je ne demande plus rien, où je cesse de construire ma vie, d’en être l’actrice principale.
J’essaye de reprendre goût à cela, parce que Jee me dit que cela va mieux avec toi, parce qu’il m’a dit qu’il souhaitait entendre à nouveau ma volonté de construire un avenir avec lui. Parce qu’il m’a répété et réaffirmé que malgré tout ce chambardement, il souhaitait toujours construire une famille avec moi.
Je reprends doucement contact avec mes désirs, et c’est pas régulier, ça induit des heurts (comme la dispute à propos de la nudité). Et surtout, je réalise que j’ai peur. J’ai peur de faire un faux pas. J’ai peur que Jee doive endurer de ta part les conséquences d’un de mes actes que tu trouverais non correct.

Tout ça parce que je t’ai accordé un pouvoir sur notre relation.
Je t’ai autorisée a avoir un droit de veto sur nos désir. Notre désir d’enfant, ou de cohabitation.
Je considère a postériori que ce n’est pas une bonne chose.
J’ai voulu être arrangeante, t’écouter, te prendre en compte, que tu ne te sentes pas abandonnée, etc… et cela n’a mené à rien d’autre que cette méfiance croissante que tu exprimes à mon encontre.
Je ne mets personne en danger. J’en ai marre de devoir dealer constamment avec les dangers imaginaires que tu invoques.

Attention, je ne dis pas que tu ne dois avoir aucune influence.
Je trouve très sain que après en avoir discuté avec nos proches, nos désirs changent. En particulier, je trouve logique lorsque Jee pense faire quelque chose avec moi, qu’il t’en parle, et que suite à votre discussion, il modifie son désir (du changement de certaines modalités à la perte du désir lui-même)
Mais ce n’est vraiment pas cela que j’ai ressenti ces derniers mois.
J’ai au contraire ressenti que les désirs de Jee n’étaient pas altérés, mais qu’il souffrait que cela te mette dans un état pareil. Et c’est là que je trouve que tu as un pouvoir malsain sur lui.

J’aimerais bien que tu puisses m’expliquer qu’il ne s’agit pas de cela. Que ce n’est pas une histoire de rapport de force et de manipulation (inconsciente).
Mais je ne rêve pas.
Nous n’avons pas la confiance nécessaire l’une dans l’autre pour que tu me le racontes avec des mots qui me rassureront. Sans compter que tu ne m’as jamais raconté quoique ce soit de ta relation avec Jee depuis que je sors avec lui.
J’ai peur que tu me répètes encore, comme depuis un an, que "tu as besoin de temps", alors que je suis convaincue que le temps n’est qu’un facteur aggravant, mais pas la cause de tes angoisses.
J’ai peur que tu cherches encore le "pourquoi", alors que le bonne question est de savoir comment.

En attendant, je vais m’atteler à vérifier que tu n’as pas de pouvoir de ce type sur moi. Je prends le risque que tu interprètes cela comme de l’agression vers toi. Cela n’en est pas.
Je veux juste pouvoir recommencer à évoluer et vivre sans avoir peur que tu me juges, sans avoir peur que mes actes reviennent à tes oreilles et que tu dises à Jee que tu désapprouves mon comportement. Sans avoir peur que, suite à ce jugement, j’en pâtisse (soit parce que Jee viendra me faire la morale, soit parce que vous vous serez disputés et que j’en ressente de la culpabilité).
Pour que tu influences à nouveau mes réflexions, pour que j’apprenne à nouveau auprès de toi, il y a tout un travail de confiance à refaire. Et d’ici là, je pense qu’il peut être une très bonne chose que nous apprenions toute deux a accepter que l’autre est telle qu’elle est et qu’on ne peut pas la changer, ni demander à Jee de modifier l’amour qu’il porte à l’autre.

Jee t’aime, je fais avec.
Je te demande, humblement, de faire de même.

(en esprérant qu’avoir écrit ça me permettra de te croiser à erSphère sans avoir peur de toi, la peur me donnant rarement des comportements adaptés...)


They who can give up essential liberty, to obtain a little temporary safety, deserve neither liberty nor safety.
Benjamin Franklin

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