Les amours de Cendre

Est-elle de mes amours ?

lundi 15 septembre 2014 à 09h06

Relation singulière, qui a toujours été miraculeuse pour moi.

Un soir de février, au bon pêcheur, Eva est rentrée dans ma vie. Pétillante, intéressante, fine, elle m’explique qu’elle serait en colère à ma place. Elle me dit donc, entre les lignes, qu’elle m’a lu, qu’elle s’intéresse à moi, que je compte pour elle, et qu’elle aimerait bien compter un peu pour moi.

Un soir de juin, sur l’île St Louis, elle m’offrira ses lèvres. Un baiser qui n’engage à rien, parce qu’il y a bien des choses mouvantes et qu’on a pas envie d’essayer de construire du dur qui risquerait de se fissurer au moindre mouvement de la vie. Un simple baiser, parce qu’on en a envie.

Un soir de janvier, enfin,
son corps, son intimité, sa jouissance,
Charmante co-amoureuse, délicieuse.

Moi intro, toi extra, c’est logique que j’ai toujours l’impression que tu viennes vers moi, que te me bouscules, me secoue.
La dernière fois encore, mes larmes sur ton épaule, tu me conseilles d’être indulgente avec moi-même. On est au café poly début Aout, dernière ligne droite pour moi, et tu as su être là, avec tact, me dire deux choses essentielles : j’ai des mots pour toi alors je te les donne mais que cela ne m’empêche pas d’avoir des mots pour d’autres et de profiter de mon café poly.

Miraculeuse.
Une relation qui fonctionne toute seule.
Une amitié ?
Ce serait ça, alors, une amitié ?
A moins que ce ne soit un amour platonique ?
Somme toute, quelle différence ?

...

Aujourd’hui, la voilà fragile.
Je le sais depuis quelques temps.
Et je ne sais pas réagir.

Je repense au nombre de fois où elle m’a soutenu, et me rend compte que je n’arrive pas à lui rendre la pareille.
Au contraire.
Des petits rien qui la blessent. Je coupe court quand je m’en aperçois, mais c’est quand même perçu comme désinvolture de ma part.
J’ai peur d’entrer dans un jeu que je connais trop bien et qui n’a jamais marché : celui de surveiller tous mes gestes et paroles dès que je suis avec la personne. C’est drôle. ça m’évoque le père de Lipton, par exemple. Ce père si capricieux, si sévère, qui m’avait pourtant beaucoup aimé d’emblée, mais que j’avais brusqué par la suite, et avec qui je devais, suite à ce désamour, prendre toutes les précautions possibles.
Pourtant, je n’ai pas eu l’impression de changer.
Juste de répondre aux invitations de mon amoureux...

Oh mais zut ! Il est hors de question que je traite Eva comme une vulgaire co-amoureuse, comme un tiers, comme quelqu’un de deuxième degré que je subis par l’intermédiaire d’une relation commune : je suis en relation avec elle non ?
Même si j’ose plus l’appeler, que j’ai peur de lui écrire ?
Non ?

Désinvolture.
D’un coté, la révolte : les relations ne sont pas des échec sous prétexte qu’elles diminuent ou cessent. Je fais déjà attention à elle. Si ça lui suffit pas, c’est normal que la relation en pâtisse, je peux pas faire plus. Désinvolture.
De l’autre, la culpabilité, le doute.
Et si mes relations étaient toutes miraculeuses parce qu’elles tiennent du fait des efforts de mes interlocuteurs. Parce qu’ils nourrissent la relation. Doute très ancien, que j’avais cru endiguer, que je ne pensais pas voir revenir en contexte poly, tellement je me sentais bien avec tous ces gens, ceux-là même qui s’autorisent à aller et venir devant moi sans que cela ne me blesse aucunement.

Elle extra et moi intro.
Je n’ai pas besoin d’elle.
Je ne vais pas me plier en quatre pour elle.
Je ne me sacrifierais pas pour elle.
Parce que je ne me sacrifierais pour personne.
Et que si les relations doivent cesser parce que mes efforts actuels ne suffisent pas, alors qu’elles cessent, comme celle avec Pémi.

A-t-elle pris la mesure de ce que j’ai écrit
« Si tout part en vrille et que je me retrouve toute seule avec mon seul boulot, au moins, je saurais qu’il y a ici une communauté avec j’aime passer du temps. »
C’était en 96, il y a 20 lunes, avant tout ça, avant que je ne les rencontre tous...

C’est pas pour ça que je vais pas orienter mes efforts en fonction de ce qu’elle me fait parvenir.

Je suis celle que je suis. Élémentaire du chaos, brusque, imprévisible. C’est pour ça qu’on m’aime et c’est pour ça qu’on me quitte.

Advienne que pourra.

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